Nous
ne sommes pas pour dire « bonne année ».
En
début d’année, je me demande quel a été mon but l’an passé,
ce que j’ai réalisé comme époux, comme enfant ou dans ma vie
professionnelle. Je me demande quelle a été la part de paix et de
vérité dans ma vie.
Il
ne faut pas quitter notre curiosité anthropologique essentielle. Il
faut prendre courageusement entre ses mains cette soif existentielle
de vérité, de conscience et de paix pour parvenir en fin de compte
à la découverte du principe de notre vie. Quand nous sommes sur le
bon chemin de cette quête, nous sommes comme celui qui conduit une
voiture sans peur et sans hésitation.
Nous
ne sommes pas pour dire « bonne année ».
Pour
l’être croyant, le futur et le passé n’existent pas, seuls sont
importants les mystères de l’amour et de la conscience. Seul
compte le « je suis » ; ce qui fait que nous sommes
comme Dieu lui-même se définit, tournés vers l’être, la vie et
l’instant présent. C’est pas la porte de la conscience que nous
découvrons que nous pouvons aussi dire « Je suis ».
C’est ce qui est hors du temps qui fait notre vie. Si je reste
esclave du temps, ne me demande ce que va devenir mon année, s’il
y aura la paix ou la guerre et je suis malheureux. En attendant ce
qui va se passer, j’oublie l’instant présent, alors que c’est
dans cet instant que se trouve la semence de la vie.
En
regardant le passé, j’ouvre des blessures. En regardant le futur,
je meurs de peur. Passé et futur sont (alors) deux monstres qui me
font dire intérieurement « C’est foutu ! ».
Pour
échapper à la peur du passé et du présent, il faut juste regarder
quelques mètres devant soi.
Il
y a devant moi l’infini et le désert. Il y a au-dedans de moi le
trésor, l’amour et la providence de Dieu. Nous ne sommes pas
capables d’être (pleinement) une providence entre nous, car les
soins que nous pouvons nous donner les uns aux autres sont bien moins
forts que la providence.
Si
j’en reste à mon identité humaine ; j’ai toujours peur,
j’ai toujours des lacunes et la tentation de me confier à des
assurances extérieures qui me laissent toujours des inquiétudes. La
peur me laisse me renfermer sur moi-même. Rien ne peut nous prémunir
contre les temps de désert et d’insécurité, ni la santé, ni
l’argent, ni le travail. Au-delà des efforts de l’entraide
humaine, ce qui fait que « Je suis » me donne la
joie et la paix de celui qui n’a plus peur et qui a conscience
qu’il est éternel.
Heureux
sommes-nous si nous connaissons ce néant qu’est le désert. Dans
ce désert, ce vide et ce néant, nous sommes des êtres de passions
et d’exigences. Dans ce néant et cette mort, Dieu est vivant et
existe. Sa première création est le néant et le vide, et il ne l’a
pas fait en vain mais pour que l’homme éprouve cette peur, ce
sentiment que « C’est la fin » et qu’il est
déboussolé. Ceux qui sont dans ces sentiments sont plus proches de
Dieu dans ce désert (que dans le confort).
Notre
vie est un désert où il y à Dieu. Nos multiples petites morts
quotidiennes sont des changements d’état continuels. Nous sommes
plongés dans le sentiment du néant et de l’obscurité comme si
nous étions dans le ventre de notre maman, avant de naître à la
pleine lumière de la vie éternelle. Notre « sœur la mort »
dont parle Saint François d’Assise est un enfantement qui nous
ouvre à la Vie. Il faut passer par le néant pour prendre conscience
de la vie qui se dévoile, pour découvrir ce que peuvent être la
joie, la paix et la fraternité.
En
acceptant de prendre conscience du néant de la vie, nos (petites)
réponses (déjà construites) se vaporisent. Ce n’est pas l’homme
qui fait le bonheur, mais c’est la vie qui se révèle à nous.
L’évangile
nous dit que c’est dans le désert que se trouve la paix. Il
annonce que toute montagne sera abaissée par le triomphe d’une
humilité aussi grande que celle de Dieu. Il a accepté d’être
petit alors qu’il est tout puissant. De même nous avons une part
de puissance humaine, nous pouvons tuer ; mais cette puissance
doit mourir pour être enfantée. Jésus nous dit que nous
n’entrerons pas, dès aujourd’hui, dans le Royaume de Dieu si
nous ne sommes pas comme des enfants.
Heureux
sommes-nous si nous savons mourir (de toutes les petites morts de nos
vies et abandonner nos plans, nos sécurités, les blessures du passé
et la peur de l’avenir). Savoir « mourir » est
important, car la mort et la vie ne se séparent jamais dans la vie
terrestre. [Mors et vita conflixere mirando]
Pour
vivre vraiment, il faut mourir en aimant et en consacrant tous nos
talents à nos frères. Si tu as deux vêtements, deux talents, il te
faut accepter de « mourir » en les donnant.
Il
ne faut pas avoir peur de continuer son exode à l’intérieur de la
vie humaine. Les israélites dans le désert ont reçu la providence
de Dieu, au milieu de l’épreuve, de l’incertitude et de la mort.
Dieu leur a donné la nourriture qui vient du ciel et de l’amour.
Ils ont rencontré ce rocher qui donne l’eau vive et qui n’est
autre que Jésus, avec eux dans le désert comme le dit Saint Paul
dans l’épître de ce jour.
Les
israélites qui ont eu peur dans le désert, qui ont abandonné la
foi dans la providence et qui voulu retourner à l’esclavage en
Égypte sont morts. Ceux de nos frères qui sont dans le désert et
regardent d’abord leur santé physique et psychologique ne sont pas
libérés.
Si
vous êtes dans le désert, vous êtes dans un chemin où il faut
regarder le Seigneur. Heureux êtes-vous si vous êtes dans le
désert.
Cherchez le désert et la voix de Dieu qui n’est jamais dans les assurances extérieures, mais se trouve dans le néant … ouvert à la providence et à la Vie que Dieu veut nous donner.
Image Marie Madeleine pénitente par Georges de la Tour
Cherchez le désert et la voix de Dieu qui n’est jamais dans les assurances extérieures, mais se trouve dans le néant … ouvert à la providence et à la Vie que Dieu veut nous donner.
Image Marie Madeleine pénitente par Georges de la Tour
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